Réponses aux enjeux du développement agricole et de protection de l'environnement
Des écosystèmes cultivés résilients par rapport au changement climatique

AC Amérique du Nord (Etats-Unis et Canada)

Après la crise économique de 1929 et suite à d’importants problèmes d’érosion éolienne (Dust Bowl, les sols nus et secs étaient balayés par le vent), les recherches américaines se sont orientées sur les produits phytosanitaires et le développement des différentes techniques de travail du sol, dont le non-labour. Le Soil Conservation Service de l’US Departement of Agriculture, est institué en 1935 pour résoudre les problèmes d’érosion hydrique et éolienne dans plusieurs régions des USA, soumises à des pratiques culturales motorisées intensives (passages répétés d’outils à disques). Il met au point au Nebraska des méthodes combinant travail superficiel et conservation de mulchs de résidus entre cycles culturaux (stubble mulch farming ou mulch tillage), évoluant vers le conservation tillage, qui vise à maintenir au moins 30 % du sol protégé par un mulch de résidu au semis (Dounias, 2001). Diverses actions incitatives étatiques accompagnent le changement technique.
Les recherches scientifiques sur le no-tillage sont lancées en 1967 en Nord Caroline (maïs sur couverture de fétuque contrôlée à l’atrazine) et en 1969 au Canada céréalier (Manitoba) et en même temps, dans les grandes plaines aux Etats Unis (Dakota du Sud). Ces études étaient essentiellement financées par des compagnies agro-chimiques.
Avec l’invention successive de divers herbicides, qui remplacent une des fonctions du travail du sol, les fermiers cherchent à se passer du labour (« labour chimique »). Après la mise sur le marché des herbicides de contact (paraquat, diquat par ICI Industry) en 1960, et la mise au point d’outils de semis direct dans le mulch (Cie Allis-Chalmers en 1961), le test par des agriculteurs et la diffusion du semis direct de maïs sur mulch de résidus ou no tillage commence dès 1962 (Kentucky, Virginie). Des progrès ont été réalisés par la suite en matière d’herbicides de contact et de produits systémiques. En 1972, 1,2 million d’ha sont cultivés en no-tillage (maïs, soja, sorgho), en 1985, 5 millions d’ha (cotonnier, arachide) et en 1997, 18 millions ha (15 %). Après l’introduction des variétés transgéniques tolérantes aux herbicides en 1996, l’intérêt pour le no-tillage à base de glyphosate se renforce aux USA (Cerdeira et Duke, 2006).
En 2011, on note i) au Canada 13,5 millions d’Ha, soit plus de 50% de la surface agricole (ce sont surtout les grandes exploitations privées qui sont touchées), ii) aux Etats Unis 26,5 millions d’Ha, soit un peu moins de 25% de la surface agricole mais plus de 50% en technique simplifiée ou travail superficiel du sol (TCS) qui n’est pas inclus dans l’AC car ne répondant pas aux trois principes.

Amérique centrale équatoriale

En Amérique centrale équatoriale, une toute autre dynamique s’est produite (Buckles et al., 1998 ; Triomphe, 1999 ; Dounias, 2001). Le mucuna est introduit dans les années 1920 dans les plantations bananières industrielles pour l’alimentation des mules et sert aussi à l’amélioration des sols et au contrôle des adventices. Dans les années 1970, des paysans pratiquant la culture itinérante de maïs sur brûlis ont spontanément adopté, sur une partie de leurs terres fertiles, une rotation maïs-mucuna. Ce système fut mis au point par les paysans, eux-mêmes, sur un principe ayant des similitudes avec le système amérindien local tapado. L’adoption rapide (10 % des paysans en 1980, 66 % en 1990) a été favorisée par l’intérêt économique de cette solution dans le contexte commercial et d’occupation du sol local. Plus récemment, une désaffection s’est fait sentir au profit d’une intensification en valeur du système de production (piment, élevage).